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Walhall

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2 mai 2007

Ce que veulent les femmes

closer1

On m'en avait dit des tonnes. On m'avait promis monts et merveilles :

"Si tu rencontres personne, t'es vraiment un boulet."
"Il y a de la chaudasse, t'imagines pas."
"Tu vas voir c'est trop facile."
"A la limite, t'en auras peut-être marre tellement t'auras baisé."

Mais le sexe ne m'intéresse pas. Dieu m'en garde. Je ne suis animé que d'intentions pures et saines, qui m'acheminent vers la plénitude et me garantissent une place éternelle auprès du Tout-là-haut. En outre, bien loin des aspirations concupiscentes du mâle ordinaire, je dois mener, pour le bien de l'humanité, mon enquête sur le sens de la vie.
C'est donc dans un but uniquement philanthropique que je me suis inscrit sur Chaudesduslip, le site de rencontres par Internet le plus populaire d'Europe. Et ce n'est pas sans fierté que je vous livre, aujourd'hui, les résultats d'un travail colossal de recueil de données, qui ne manqueront pas, j'en suis persuadé, d'éclairer notre lanterne (la mienne, soit) quant au sens de la vie.

Après analyse quantitative des pages des individus femelles objets de l'expérience et croisement de ces résultats avec leurs réponses à un questionnaire ultra-secret construit par mes soins de manière à fournir des données objectives, il apparaît que :

  • 98,1 % d'entre elles ne recherchent "ke de l'amitié, pervers s'abstenir".

  • 88 % disent vouloir perdre du poids.

  • 17 % font un régime.

  • 71 % aiment le chocolat.

  • 29 % avouent préférer le Nutella.

  • 93,9 % des femmes interrogées se trouvent imprévisibles.

  • 54 % partagent leur existence avec un chat, que tout de même 18 % d'entre elles ont nommé "Marc Darcy".

  • Seulement 0,8 % de ces nobles jeunes femmes suit avec assiduité le championnat de Ligue 1, et une seule s'est avouée inquiète pour le PSG (mais la question posée était un peu inductive).

  • 34 % préfèrent la montagne à la mer en été, alors que les Alpes c'est si beau.

  • 65 % vivent à l'étranger, je veux dire en province.

  • 100 % disent : "Je suis trop chiante, j'espère ke tu pourras me supporter lol".

  • 77 % s'estiment "assez jolie selon mes amis".

  • Rendez-vous compte que 61 % d'entre elles dorment non avec un homme ou une femme, mais avec un morceau de tissu déchiré et jauni par le temps répondant (façon de parler) au sobriquet de "Doudou".

  • 79 % pensent que le but de la vie est le bonheur.

  • 21 % pensent que le but de la vie est le plaisir.

  • 100 % pensent que pour accéder au bonheur, il faut se faire plaisir.

  • 54 % pensent que le plaisir est au bonheur ce que la boite de vitesse automatique est à la boite manuelle.

  • 31 % pensent que le bonheur est au plaisir ce que la théorie est à l'expérience.

  • 56 % ignorent ce que la théorie est à l'expérience.

  • 65 % d'entre elles pensent que Haägen-Dasz peut te guérir de ta rupture avec Kévin.

  • A la question ouverte : "Pouquoi vous êtes vous inscrite sur Chaudesduslip sinon pour niquer ?", 87 % répondent : "Pas du tout d'accord", 1 % ne se prononce pas, 4 % rougit, 5 % révéle soudainement la masculinité de son sexe, et 3 % réponds : "Je ne nique pas, je fais l'amour".

Les résultats de cette enquête se révélant quelque peu obscurs au premier abord, nous avons demandé à notre super-calculateur de générer une réponse mathématique, à l'aide d'un croisement de variables assez complexe. Le résultat de ce long calcul approchera sans aucun doute d'assez près la réponse à la question : "Quel est le but ultime poursuivit par une femme inscrite sur Chaudesduslip ?"

La réponse ne saurait tarder.

Ah ! Le voyant rouge s'est éteint.

Ah ! Le voyant vert s'est allumé.

Ta-daaaaaaaam !

Ca y est ! Inscrite sur l'écran du super-calculateur, voici, livrée pour vous aujourd'hui, ce que veulent à tout prix (enfin pour au moins 29,90 euros par mois, tout de même) les femmes inscrites sur Chaudesduslip :

"Faire l'amour, en toute amitié, avec un surfeur de province nommé Marc Darcy, qui se contrefiche de l'avenir pourtant incertain du PSG et qui ferme les yeux à la fois sur les excès de Nutella et sur l'ignorance de l'indissociabilité fondamentale qui unit théorie et expérience".

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19 août 2006

Quand on peut, parfois, on ne veut pas.

NoFrance

Dîner chez une amie. Une bonne bouffe, une dizaine de personnes, pas une de ma connaissance, a priori tout va bien, j'aime les rencontres.
Mais pas celle-là.
J'aurais pu sous-titrer ce post : "Ou comment me faire passer une mauvaise soirée en quelques secondes".

Lorsqu'elle est arrivée, elle non plus ne connaissait personne, sinon l'hôte elle-même. Par un hasard aussi malheureux que hautement prévisible (Dieu, si tu me regardes, je t'emmerde, mais alors profond), elle s'est évidemment assise à côté de moi. Jolie, au demeurant.
Au bout d'un moment, elle engage la conversation avec sa voisine. Elles s'étonnent et se réjouissent du fait qu'elles partent vivre toutes les deux dans un pays étranger l'an prochain grâce au programme Erasmus. Je me réjouis avec elle.

Et là, sans crier gare, c'est le drame.

Elle : "N'empêche, je ne comprends pas les gens. Vous vous rendez compte ? Cette année il n'y avait pas assez de demandes d'étudiants pour partir à l'étranger, et ils n'ont pas pu remplir toutes les places disponibles. Franchement, les Français sont vraiment des trous du cul. Ils veulent pas partir, quoi. Ils sont bien dans leur vie de merde à regarder la télé, ils lisent jamais de bouquin et surtout ils quittent jamais leur pays de cons. Rien qu'à Paris, ça se voit : les gens ne vont jamais au musée, jamais dans les expos, ils lisent tous Da Vinci Code et puis ça y est, quoi. Au cinéma il vont voir que des merdes américaines alors qu'il y a trop de bons films indépendants, mais non, ça leur changerait trop leurs vies, ça les ferait trop réfléchir, ça les ferait trop s'ouvrir au monde."

Je lui aurais bien récité du Bourdieu au mégaphone dans l'oreille pendant une heure ou deux, jusqu'à ce que ça commence à rentrer. Au lieu de ça, les poings serrés de plus en plus fort pour contenir l'envie de lui parler trop sèchement, j'ai essayé la méthode posée en glissant un petit et retenu :
"Il y a des gens qui n'ont pas les moyens de partir."

Elle s'insurge. "Ouais nan mais attends ça c'est pas vrai. Quand tu veux partir, tu te démerdes. Regarde, j'ai une copine à la fac, ses parents n'ont pas les moyens, et bah elle s'est démerdée, elle est partie, et elle a bossé là-bas. C'est une question d'ouverture d'esprit, c'est tout. Quand on veut, on peut."

Ca a duré bien plus longtemps que ça. Je n'ai plus dit un mot tant que la conversation n'a pas dévié vers autre chose.
Pour l'argument de surface, j'étais d'accord avec elle : nous ne voyageons pas assez. Pour la petite phrase assasine sur les Français et leur réclusion sur eux-mêmes, je ne sais pas ; je ne connais pas 60 millions de personnes, et les généralités de cette espèce m'inquiètent plus qu'elles ne m'interpellent.
Pendant toute la conversation-monologue (elle était vraiment énervée, même les filles n'ont pas pu en placer une, c'est dire), j'ai regardé alternativement mon assiette et le mec en face, à l'autre bout de la table, qui écoutait attentivement en fumant sa clope et en regardant le plafond, avachi sur sa chaise. Je ne le connais pas (ou seulement à travers l'hôte de la soirée), mais je sais que lui ne voyage jamais. D'une part, parce qu'il ne quitte jamais sa banlieue natale, et d'autre part parce que - alors que mathématiquement il en aurait les moyens - il n'en a pas envie.
L'histoire de moyens financiers est un faux problème, évidemment. Mathématiquement, en gagnant un peu plus que le minimum requis pour vivre, on peut se payer un billet d'Eurostar au bout d'un moment. Mais pendant cette conversation, je ne pouvais m'empêcher de me rappeler cette histoire de places de théâtre à 3 euros. Si si, souvenez-vous, il y a quelques années a été lancée l'idée que les jeunes de banlieues "défavorisées" n'avaient pas assez accès à la culture. Une vérité incontestable, sans doute. Alors - LA bonne idée - on leur a proposé des places de théâtre pratiquement gratuites. Et que croyez-vous qu'il arriva ? Un flop, évidemment. Parce qu'on avait pensé que la culture en question leur était inaccessible uniquement parce qu'ils n'en avaient pas les moyens économiques. Oops, on avait oublié que c'est aussi une histoire d'"univers des possibles".
Il y aurait beaucoup de contre-exemples à donner à ce ratage. Certaines initiatives parties de la même envie de rendre la culture accessible ont plutôt bien fonctionné, enfin je crois. Certainement parce qu'elles prenaient en compte beaucoup d'autres choses.
Mais ce que disait en tout cas cette fille, ce soir-là, m'a procuré la même impression de hauteur et de bêtise que cette histoire de théâtre à pas cher. Bien sûr, beaucoup de gens ont les moyens financiers mais ne partent pas. Ils préfèrent s'acheter un écran plasma et de belles pompes plutôt que des livres ou un billet pour Dublin. Parce que la culture étiquettée "Culture" les fait chier, aussi, et, d'une part, c'est leur droit, d'autre part, ça s'explique par autre chose qu'une histoire d'être ou pas un trou du cul.
L'argument de la copine de fac qui n'a pas un rond mais qui part quand même est peut-être un bon exemple d'argument bidon. Si elle part, elle en a les moyens, c'est purement logique. Si elle part, en tout premier lieu, c'est que le départ fait partie des possibilités de son univers. Si elle part, c'est qu'elle a accès au départ. Elle est à la fac ; elle fait des études de langues ; elle lit des livres ; son entourage est composé d'étudiants. Certes, ses parents ne lui payent pas le billet, à elle, mais quel rapport ? Un brin de sociologie le montrera mieux que moi, pour elle il est envisageable de partir. Si ma coiffeuse Wendy ne part pas, c'est peut-être parce qu'elle a vécu toute sa vie dans un quartier bien laid de Montrouge ; qu'elle sait à peine parler sa langue maternelle ; qu'elle n'a jamais fait d'études supérieures ; que l'art, la culture intellectuelle et ses dérivés, Paris, les nuances de la vie, l'envie d'apprendre et les livres sont des choses auxquelles elle ne pense jamais ; et qu'elle ne connaît pas, n'a jamais connu et ne connaîtra jamais, elle, des dizaines de jeunes étudiants partis "s'ouvrir" à l'étranger.

Bref. Les voyages ne sont pas une preuve d'ouverture d'esprit. On aura beau parcourir des kilomètres tant qu'on voudra, on ne s'ouvrira vraiment que lorsqu'on quittera réellement son univers pour recevoir celui des autres. Et ça, le simple fait de quitter son univers géographique est loin de le garantir.

Pour la petite histoire, j'ai appris bien après que la protagoniste de ce maigre récit vit dans un hôtel particulier du Marais.
Quand on veut, on peut.

18 août 2006

Un petit pas pour ma coupe de cheveux, un bond de géant pour la perplexité

1879Bien. Après ces quelques instants de contemplation plus ou moins sombre, il est temps de passer aux choses sérieuses. C'est que j'ai une enquête à mener, moi. Non que je m'en sois écarté d'une quelconque façon depuis le début (s'il l'on excepte ce que l'on pourra appeler l'"incident Michael Knight"). Mais je vous sens fébriles. Je sens poindre en vous cette même impatience qui m'habite lorsque, dans un film, les héros s'embrassent, s'engueulent ou baisent sans retenue juste au moment où le compte-à-rebours de la bombe nucléaire qui va détruire la galaxie affiche 00:00:07. L'essentiel est sur le point de se passer (elle va le regarder, il va faire une petite blague, il vont parler de la fin du monde avec un détachement surnaturel, puis - en fermant les yeux parce que soudain c'est trop horrible - il va couper le fil bleu après avoir tergiversé comme un connard pendant 5 secondes sur le rouge), mais l'action est figée sur le seuil du dénouement. Et même si ce blog est aussi passionnant que la croissance d'une huître filmée au ralenti, il est facile de deviner votre enthousiasme à la lecture de mes posts et, donc, votre attente tremblante et votre angoisse de voir toujours repoussée l'imminente révélation ultime sur le sens de la vie.
Vous avez entièrement raison. Toutefois, l'humilité me contraint de laisser la parole aux experts. Il existe en effet des gens spécialisés dans la réflexion sur le sens de la vie, ou plutôt, devrais-je dire, dans la réponse à la question du sens de la vie.
Je vous vois venir : non, la réponse n'est pas 42.
La réponse s'appelle Wendy.
Wendy est le nom de ma coiffeuse, qui en connaît un rayon.

"Alors, vous êtes étudiant ?
- Euh, oui, enfin pas v...
- Je le savais, vous avez une tête d'étudiant. Enfin je dis ça hein, vous voyez ce que je veux dire, c'est pas comme d'autres, quoi. Vous ça se voit que vous êtes posé et tout, réservé, machin, mais y en a qui savent pas réfléchir et qui croivent tout savoir en plus, ahlala moi ça me fait marrer mais remarquez, des fois j'hallucine quand même parce que y a des types qui entrent comme ça, l'air de rien et tout, et ils se mettent à vous raconter leur viiiiie ! un truc de malade, y a plus à les arrêter : et que je te raconte ma life, et que ma grand-mère elle s'appelle machine et que je voudrais une super coupe de branleur... Excusez-moi je suis un peu grossière là, mais bon... Vous voulez plus court que d'habitude ou je fais comme d'ordinaire ? D'accord, nan parce que y en a, faut les voir hein.
[...]
Moi je crois que les gens ils se rendent pas compte. On nous dit "Ouais... M'enfin tu comprends... Là on peut pas, quoi." Mais moi je dis si qu'ils peuvent !
[...]
[Par respect pour les ouvriers et pour éviter que l'Univers n'implose, je coupe l'histoire supersonique de la réfection inadmissible du trottoir à l'entrée du métro de notre quartier]
[...]
Et là il y a l'autre qui se ramène, y m'dit "tu", le gars, moi je veux bien, mais après qu'il vienne pas m'toucher, hein, non parce que je vous jure il y en a qu'on croirait qu'à la place du cerveau ils... Et je vous coupe les pattes, oui hein ?
[...]
Ah bah t'façon c'est clair, c'est l'argent qui dirige les gens. La vie c'est ça, hein, faut pas l'oublier. Bah ouais regardez rien qu'l'autre jour, avec les collègues on a eu une réunion là sur la... euh... merde je sais plus trop comment ils appelent ça... la re... la re... bref, il y a des gens qui vont se faire virer ici. Ah ouaaiiiis nan mais qu'est-ce que vous croyez attendez nan nan il se passe trop des trucs en ce moment, ouais nan je crois qu'au jour d'aujourd'hui l'économie ça va pas très bien là, en France. Ah ouais ouais, nan nan, attention hein. C'est la conjontion, ils appellent ça. Enfin j'disais ouais c'est l'argent tout ça. C'est que du fric, eh ouais. C'est le moteur de toute chose. C'est comme il disait l'autre, comment il s'appelle ? Bah tiens vous qu'avez fait des études, vous devez le connaître. Qui ça ? Non. Non non. Enfin bref, c'était un penseur qu'a dit ça. Que l'argent ça gouverne tout. C'est l'opium du peuple, qu'il disait. Bah vous savez quoi ? Moi personnellement plus je me dis ça, plus je crois que c'est pas faux."

Nous avons donc avancé dans notre enquête : l'argent serait le moteur de toute chose. Bon, je n'ai pas abordé la question avec Wendy (qui m'a encore raté derrière, soit dit en passant), mais tout cela ne nous renseigne pas complètement sur l'intérêt que peut présenter le fait d'être en vie. Si l'argent est le moteur de toute chose, il nous manque toujours la destination à rentrer sur le GPS, et qui nous aiderait à comprendre l'intérêt du moteur lui-même. Parce qu'on est content d'avoir de l'argent - apparemment-, mais pourquoi ? Malheureusement, je ne vais me faire couper les cheveux que tous les quatre mois. Nous sommes donc condamnés à chercher par nous-mêmes la solution de cette nouvelle énigme.

16 août 2006

Une fin

Il ferme enfin la porte de son bureau. Les femmes de ménage sont parties avant le dîner, alors qu'il lui restait encore quelques heures de travail. Lorsqu'il a éteint son ordinateur et plongé ses dossiers dans la pénombre, quelque chose s'est brisé silencieusement en lui. Une fissure a fait son chemin. Mais c'est seulement en fermant cette porte qu'il réalise le tremblement général qui secoue son petit corps passif.
Il a très peur. La gorge nouée, le coeur vacillant, il se donne l'impression de peser deux fois son poids et de s'enfoncer profondément dans la moquette du hall de l'étage - désert, comme à l'accoutumé. Les secrétaires, qu'il aime et jalouse à la fois, sont parties depuis longtemps, elles aussi. Tout le monde, dans la vie d'Edouard, est parti depuis longtemps. Lui même, lui semble-t-il, s'est quitté ; mais comment en être sûr lorsqu'on ne se connaît pas ?
Parti, c'est le sentiment qu'il ressent néanmoins. Edouard n'est plus là, se dit-il, et déjà il est extérieur à lui-même, parle de lui à la troisième personne. Dans quelques secondes, lorsqu'il ouvrira la portière du taxi, il se parlera à voix haute. Ce n'est que lorsque le chauffeur lui demandera sa direction que va s'opérer le changement le plus important de la vie d'Edouard.
Impénétrable, inextinguible et incroyablement vitale, l'envie de fuir le saisit.
Heureusement pour son ego, la pluie qui bat les vitres du taxi dissimule, sur son visage reflété, les ruisseaux échappés de ses yeux. Doucement, régulièrement, comme une caresse, les gouttes extérieures viennent frapper la carlingue et produisent de petites détonations mates, chaudes et humides. S'il voyait encore en couleurs, Edouard y aurait distingué quelques nuances de pourpre.
Tout aussi sombre sera le sang que ses poignets mutilés verseront dans la baignoire de son appartement, vingt-cinq minutes plus tard.
"Qu'est-ce que cela aura été, ma vie ?" Telles seront ses dernières pensées, bien après que ses yeux inutiles se seront fermés.



D'après des millions d'histoires vraies.

16 août 2006

Tombe, soleil.

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Enfin l'hiver.
Le froid, la pluie, Paris glaciale, les vitres fermées, le gris, le béton, la vraie crasse, la boue, les paillassons dégeulasses, les parapluies, les capuches, les grosses godasses, les impairs, les têtes baissées, les doigts gelés, les gants troués, les gamins en pleurs, les cheveux trempés, la fausse tristesse, les rues dégoulinantes, les visages fades, les vitrines déprimantes, les pommes de terre fumantes, les plages désertes, la nuit du début à la fin, les chauffages en fonte, les clopes en quatrième vitesse, les pavés glissants, les voitures sombres.
Disparus les bronzages inhumains, les 15 milliards de piercings au nombril, les lunettes de soleil dans les cheveux (ça fait 10 ans, les gars), les queues devant les glaciers, la moitié de la planète à Montmartre, le livre ostensible sur la petite table en terrasse à côté de la petite tasse de café saisie par de petits doigts d'écrivaillon impotent de la très petite Sorbonne, les 60°C du RER, les voitures claires, les rues claires, les façades claires, les robes claires, les chaussures claires, les vacances imposées, les bureaux fermés, l'air immobile, les sens ralentis, le bonheur illusoire, la fête obligatoire, la fuite, le calme avant la guerre, et pour une fois, là, le temps qui passe nous éloigne de la mort - en nous rapprochant de l'hiver.

L'été est une simulation ; un mensonge ; une laideur. Quel dommage, la vie pourrait être si belle.

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15 août 2006

"Oooooo saaaaay caaan you seeeeeeeee..."

L'enquête suit son cours. Après une escale incompréhensible chez Mitch Buchanon, nous continuons de chercher le sens de la vie sur le Nouveau Continent, où tout est à la fois luxe et beauté, profondeur et légèreté :

hjsdert18

14 août 2006

La chute d'une idole

Ca n'a strictement rien à voir avec ce blog, mais je n'ai pas pu résister, il faut que la planète entière voie ça.

Je ne ferai aucun commentaire, parce que j'en suis incapable, tout occupé que je suis à éteindre mon fou rire.

Lisez la vidéo de la page suivante :
http://clipbin.blogspot.com/2006/05/david-hasselhoff-hooked-on-feeling_25.html

14 août 2006

Robert et les femmes

Egarons-nous un moment.

Voici ce que nous dit le Robert (oui, j'ai des lectures de chevet tout à fait excitantes) :

robert9782849022375"MINUSCULES.
[...]
B. - Emploi abusif.
Parallèlement à l'emploi abusif des capitales, on observe une tendance inverse dans l'écriture des snobs, sur les écrans de télévision, les titres des livres, les cartes de visite, les enseignes... Elle consiste à ne pas mettre de majuscules aux noms propres (le Lot n'est pas le lot). Ce qui conduit à de curieuses rencontres : me boucher et mme (pour : Me Boucher et Mme). Sait-on que cette manière d'écrire était une farce des "dadas" des années 20 (ils mettaient même quelquefois la majuscule à la finale des noms : boucheR) qui a été prise au sérieux ? Ne prenons pas cela pour une élégance, c'est une faute, et la preuve qu'on est un naïf."

Si vous ne croyez pas le Robert, si vous doutez qu'il y ait des gens pour oublier volontairement quelques majuscules et essayer illusoirement d'accéder par là à un certain degré d'élégance, tournez quelques pages de ce site.
Ou bien balladez-vous sur des blogs. Vous observerez toutefois que la tendance inverse est bien plus répandue : surtout sur les blogs féminins, on trouve beaucoup de majuscules superflues. Beaucoup, oui, et surtout aux mots Amour, Amitié, Art, Autre, Littérature, Nature et, parfois, Connard.

Les majuscules aux mots des femmes ne sont, pour la plupart, que tromperie. Elles veulent nous faire croire qu'il y a de la grandeur dans ce monde. Elles veulent répandre cette croyance nauséabonde en un amour avec un grand A, et elles ne parlent pas du fleuve, ces connes. Ne nous méprenons pas non plus sur le sens de ce qu'elle appellent "l'Autre". L'Autre, ce n'est pas toi. L'Autre ce n'est jamais toi. La majuscule est là pour marquer l'entrée dans l'abstraction, la conceptualisation, ce qui équivaut souvent, pour elles, à la philosophie.
Enfin, ami mâle, ne te leurre pas sur la signification du terme "Connard". Ici, le piège est subtil, car pour une fois, la majuscule est méritée. Un connard, il n'y en a qu'un. Monsieur Connard est en effet l'équivalent moderne du prince charmant. Le bad boy, le méchant, celui qui les emmènera loin et leur fera vivre l'aventure. Car c'est bien connu, le Connard est généreux et ne pense qu'à faire vivre à sa compagne l'épanouissement de ses rêves de femme. Si l'on te traite de Connard, tu as donc toutes tes chances. Tu es justement ce qu'elles recherchent, alors accroche-toi. Tu n'es pas un simple connard, un enfoiré de base, tu es Connard, leur héros enfin arrivé.
 

14 août 2006

Crache, ça fait du bien

Ne pas se faire avoir. Ne vous laissez pas avoir. Nous ne sommes que des êtres faillibles. Et rions-en, parce qu'il faut avouer qu'il y a quelque chose d'irrésistiblement comique à lutter toute sa vie pour combler ses failles, rafistoler ses écorchures, ressouder ses membres et espérer qu'on va, un jour, arrêter de se casser la gueule. C'est marrant, parce que pour celui qui a peur, ça ne s'arrête jamais. Et pour celui qui y réfléchit, c'est presque aussi terrible. 
Il est ridicule de chercher le sens de la vie, pourrait-on dire. Mais je ne le dirai pas. Chercher le sens de la vie, c'est déjà quelque chose qui a du sens. C'est s'accrocher, ne pas se laisser sombrer, ne pas accepter que l'existence puisse être aussi vide. C'est, pour reprendre les mots d'une autre, accepter le fait que la vie, c'est du boulot.
Nous sommes des failles vivantes, nous passons notre temps à nous casser la gueule, à nous tromper, à nous mentir, à reculer, à gémir, à vomir, à pleurer, à déféquer, à redouter, à regarder en l'air, à ne rien voir. Voilà notre condition, elle est si simple qu'on se demande pourquoi personne ne l'accepte. Lutter contre, ce n'est pas l'accepter. Lutter contre, c'est renier sa part de puanteur, c'est croire à un échappatoire illusoire, c'est le premier pas vers un mysticisme débile et un effort pathétique de distinction. A l'inverse, certains préfèrent abandonner toute lutte et se laisser aller à une apologie de l'absurde qui déguise mal, parce qu'elle s'emploie trop grossièrement à montrer l'inverse, le besoin le plus primaire d'une consistance de l'existence.
Vivre, c'est lutter, mais avec toute cette merde, à son côté, en plein dedans même. Ca pue, mais ça fait partie de nous, et c'est tout aussi bon que ce qu'on pense bien meilleur. C'est pour cela qu'il faut parler, il faut dire toutes ces conneries qu'on a envie de cracher. Rien ne sert d'ôter à la vie ce qu'elle a de plus consistant - nous - lorsqu'on en recherche le sens ; en faisant ainsi, on se risque à la fantasmer ou à la détruire, et dans les deux cas, on s'expose à des blessures inutiles.

14 août 2006

Man with guitar

paris_toit_pluien24Hier soir, sous une pluie légère, un homme a passé une heure sur son balcon, en vis-à-vis de mon appartement. Dernier étage, dans le quatorzième arrondissement. Peu de circulation en bas, dans la rue, mois d'août oblige.
La quarantaine, mal rasé, en chemisette à carreaux bleue, il s'est assis sous un parasol trempé et a posé une guitare sur ses genoux.
Pendant un quart d'heure, il n'a pas joué. Il regardait peut-être la place, en contrebas, promenant ses yeux tristes sur les pavés luisants et silencieux. D'une main seulement, il caressait les cordes avec nonchalance, sans produire le moindre son. Puis, quelqu'un, une femme de son âge environ, est venu lui dire quelque chose avant de retourner s'abriter à l'intérieur de leur appartement.
Et là, tournant le volume de mon ordinateur au minimum, j'ai pu entendre quelques notes. Mais surtout, j'ai pu observer l'indicible paix qui nimbait ce curieux personnage, venu s'isoler après un repas en famille, pendant que, dans son salon, les variations soudaines et bleutés de l'éclairage trahissaient la présence d'une télévision allumée.
Il joua quelques notes, en s'arrêtant régulièrement au début. Il alluma une cigarette, approcha un cendrier à moitié plein d'eau et de mégots et dissimulé au pied d'un bac à fleur. Il le posa sur la table, sous le parasol, et attaqua les cordes avec plus de velléité.
Il a joué trois quarts d'heure. J'ai fini par éteindre complètement le son de mon ordinateur. Je me suis mis dans le noir, derrière la fenêtre, et je l'ai regardé jusqu'à la fin. Pendant tout ce temps, bercé par la nostalgie des notes, j'ai essayé de percer l'homme à travers le guitariste. Je voulais soudain savoir qui il était, pourquoi il avait ressenti le besoin de jouer, à ce moment, à cet endroit, et dans quelles circonstances. J'aurais voulu tout découvrir, qui était cette femme venue lui parler, qui regardait la télé dans le salon, s'il s'entendait bien avec ses enfants, ce qu'il pensait de sa vie, ce qu'il pensait de sa musique, à quoi il pensait lorsqu'il jouait, si le souvenir de certaines femmes lui revenait, ou des pensées professionnelles, ou simplement le plaisir de la nicotine, de la musique et de la solitude réunies. Cet homme avait l'air légèrement troublé lorsqu'il jouait, mais son trouble ne laissait aucune impression de tristesse, d'inquiétude, d'émotion incontrôlable, et témoignait uniquement d'une concentration appliquée. Il savait sans doute qu'il ne jouait pas très bien. Ce qui me frappait, surtout, c'était sa sérennité.
On aurait dit qu'il ne craignait rien.

A croire que l'intérêt de la vie, lui, il s'en était fait sa propre idée.

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